I. Introduction
Le Laboratoire de lutte contre la maladie du ministère de la Santé nationale et du Bienêtre social a organisé une série de réunions afin de donner suite aux inquiétudes exprimées relativement au risque de transmission des virus de l'hépatite B et de l'immunodéficience humaine dans les établissements de soins de santé. Ces rencontres, tenues à partir de décembre 1991, visaient à cerner les terrains d'entente chez les groupes canadiens intéressés, en ce qui concerne les problèmes liés à la transmission de pathogènes à diffusion hématogène, notamment les virus de l'hépatite B (VHB) et de l'immunodéficience humaine (VJH), par un travailleur de la santé à un patient, en milieu de soins. Il a été convenu que les mêmes recommandations s'appliqueraient au dépistage, à la divulgation et au traitement des patients. Bien que les données fassent défaut relativement au risque de transmission du virus de l'hépatite C et des virus lymphotropes humains autres que le VIH en milieu de soins, on prévoit adopter, pour les autres virus à diffusion hématogène, une approche analogue à celle utilisée pour le VHB et le VIH.
Voici quelles sont les questions qui ont été abordées au cours de ces réunions :
le dépistage du VHB et du VIH chez les travailleurs de la santé;
le Guide de prévention des infections;
l'observance des mesures de prévention des infections par les travailleurs de la santé;
la formation des travailleurs de la santé aux principes et aux mesures de prévention des infections;
les travailleurs de la santé infectés par le VHB ou le VIH et le risque de transmission en milieu de soins;
le traitement clinique des travailleurs de la santé avant et après l'exposition;
l'évaluation des travailleurs de la santé infectés par le VHB ou le VIH;
l'évaluation des interventions effractives effectuées par des travailleurs de la santé infectés par le VHB ou le VIH;
la divulgation du fait qu'un travailleur de la santé est infecté;
la sensibilisation de la population.
Les participants (voir annexe 1) représentaient un vaste éventail d'organisations canadiennes qui s'intéressent aux soins de santé, à l'éthique dans le domaine de la médecine et à la législation canadienne à cet égard.
Les énoncés et les recommandations formulés à l'issue de ces discussions reflètent les questions qui trouvent consensus, à la lumière des connaissances actuelles; les participants ont toutefois exprimé un éventail d'opinions, dans la plupart des domaines. On apportera des modifications à ces recommandations si les résultats des études et des recherches en cours l'exigent. Le présent document constituera un guide précieux pour ceux qui sont chargés de l'embauche,de l'éducation et de l'agrément des travailleurs de la santé ainsi que des lois dans ce domaine au Canada.
Dans les recommandations suivantes, on entend par «exposition importante» un incident au cours duquel du sang ou un autre liquide organique à risque élevé* entre en contact avec : une cavité du corps d'une autre personne; un tissus souscutané; la peau ou une muqueuse non intactes, gercées ou éraflées. Dans une telle circonstance, un instrument contaminé par le sang d'un travailleur de la santé ou par un écoulement de sang pourrait constituer le mécanisme responsable de l'exposition importante; on ne considère pas cependant la rupture ou la perforation d'un gant comme une exposition importante.
II. Le dépistage du VHB et du VIH chez les travailleurs de la santé
Énoncé
Les programmes de dépistage de l'infection par le VHB ou le VIH chez les travailleurs de la santé doivent reposer sur des données scientifiques, s'inspirer des principes éthiques ou des précédents juridiques et tenir compte des besoins de la population. Pour l'instant, aucune loi canadienne ne vise particulièrement les conditions en vertu desquelles le dépistage du VHB ou du VIH chez les travailleurs de la santé est justifié.
Les participants aux réunions étaient d'avis que la mise en place d'un programme obligatoire de dépistage à l'intention des travailleurs de la santé ne modifierait pas vraiment le risque déja extrêmement faible qu'un patient soit infecté par le VHB ou le VIH dans un établissement de soins de santé. Étant donné le risque, le dépistage obligatoire constituerait une mesure injustifiée, qui porterait atteinte aux droits à la vie privée et risquerait de se traduire par des gestes discriminatoires. L'existence d'un tel programme de dépistage aurait sans doute des répercussions fâcheuses importantes sur la prestation des services et sur la formation des travailleurs de la santé en ce qui concerne les pratiques adéquates de prévention des infections; en effet, les rares ressources consacrées à ces activités qui revêtent une importance hautement prioritaire seraient détournées au profit du programme. En outre, les scientifiques ne sont pas encore en mesure de préciser quelle devrait être la fréquence du dépistage si un tel programme était mis en oeuvre.
Recommandations
À la lumière des connaissances scientifiques actuelles, il n'est pas justifié d'exiger que les travailleurs de la santé subissent un test de dépistage obligatoire.
On devrait inciter les travailleurs de la santé qui ont déja subi une exposition importante ou qui présentent des facteurs personnels de risque (par exemple, des pratiques sexuelles à risque élevé, l'usage de drogues injectables) à subir volontairement un test de dépistage du VHB ou du VIH. Il n'est pas recommandé que les travailleurs de la santé qui ne présentent aucun facteur personnel de risque, étant donné les risques percus ou potentiels de transmission du VHB ou du VIH au cours de leur travail (par exemple, les personnes qui effectuent des interventions effractives), subissent volontairement un test de dépistage.
À la suite d'une exposition importante au sang d'un patient ou à un autre liquide organique à risque élevé, on recommande que les travailleurs de la santé acceptent volontairement de subir un test de dépistage si : (a) on sait que le patient en question est infecté par le VHB ou le VIH; (b) les signes épidémiologiques évoquent la possibilité d'une infection (par exemple, des pratiques sexuelles à risque élevé, l'utilisation de drogues injectables); (c) on ne connait pas les antécédents du patient en question ou ce dernier n'est pas en mesure d'accepter ou de refuser un test de dépistage.
Les travailleurs de la santé ont l'obligation morale de subir un test de dépistage, à la suite d'une exposition importante d'un patient au sang ou à un liquide organique à risque élevé d'un travailleur de la santé, si l'état sérologique de ce dernier est inconnu. (Voir partie X, recommandation 2).
III. Le Guide de prévention des infections
Énoncé
Les précautions universelles ont été mises en vigueur au Canada en 1987,[1] afin de faire écho aux inquiétudes exprimées quant à la transmission professionnelle ou nosocomiale du VHB ou du VIH par exposition percutanée. Les précautions universelles visent expressément à prévenir la transmission de pathogènes à diffusion hématogène aux travailleurs de la santé par les patients; ces précautions doivent toutefois être utilisées conjointement avec les méthodes habituelles de prévention des infections, pour les infections confirmées ou soupçonnées.[2] Une autre méthode officielle, précautions avec les liquides de l'organisme,[3] remplace les anciennes méthodes d'isolement, sauf dans les cas d'infections à transmission aérienne. II n'est pas recommandé, ni en vertu des précautions universelles, ni en vertu des précautions avec les liquides de l'organisme de prévoir un étiquetage particulier des échantillons ou d'exiger que certains patients fassent l'objet de soins spéciaux parce qu'ils présentent des risques potentiels de transmettre une infection.
L'insuffisance de distinctions entre les précautions universelles et précautions avec les liquides de l'organisme s'est traduite par une application non uniforme des modalités et principes. L'emploi rigoureux de ces deux termes lorsqu'il s'agit de faire ressortir l'importance d'une définition normalisée de la pratique contribuerait à accroître la compréhension des différences fondamentales existant entre ces termes et favoriserait l'application uniforme des modalités et principes.
Recommandations
On devrait considérer que les précautions universelles constituent les normes minimales de pratique au chapitre de la prévention de la transmission des pathogènes à diffusion hématogène en milieu de soins. Il convient de définir les précautions universelles de facon claire et uniforme, partout où l'on y fait référence.
Il convient de réunir en un seul document, de réviser et d'étoffer les lignes directrices du LLCM quant aux précautions universelles. Ces lignes directrices devraient reposer sur les résultats les plus récents de l'évaluation des risques et des avantages et sur les conclusions de la recherche et être concues de facon à être aisément adaptables aux besoins particuliers des usagers. Le LLCM devrait jouer un rôle de chef de file lorsqu'il s'agit de présenter ces directives aux utilisateurs, notamment aux associations professionnelles, aux organisations médicales, aux établissements de soins de santé et aux éducateurs.
Les milieux de soins (notamment les établissements, les cliniques et les cabinets privés et le personnel de première ligne) et les morgues devraient disposer de documents écrits où seraient énoncées les stratégies de prévention des infections dans leur domaine respectif ainsi que les mesures recommandées en cas de risque d'exposition importante au sang ou à d'autres liquides organiques à risque élevé. Ces politiques et ces mesures devraient être conçues de concert avec les experts compétents.
On devrait réviser les stratégies de prévention de la transmission des pathogènes à diffusion hématogène à mesure que l'on dispose de données nouvelles et réévaluer leur efficacité.
IV. L'observance des mesures de prévention des infections par les travailleurs de la santé
Énoncé
Selon les données actuelles, le risque qu'un travailleur infecté transmette la maladie à un patient par le biais de sang contaminé est minime lorsque le travailleur en question respecte les mesures recommandées de prévention des infections. On peut concevoir des mécanismes qui permettent d'évaluer et d'accroitre l'observance en mettant en vigueur des normes à cet égard. Mais il n'est pas facile de renforcer l'observance des mesures de prévention des infections, notamment les précautions universelles.
Dans les établissements de soins de santé, on peut avoir recours à des programmes internes d'assurance de la qualité et de gestion des risques, afin d'évaluer l'observance des mesures recommandées de prévention des infections. Les organismes d'agrément de l'extérieur peuvent participer à cet exercice. Bien qu'il soit plus difficile d'évaluer l'observance dans les établissements privés, des méthodes telles que les vérifications internes, les évaluations cliniques et les inspections sur le terrain pourraient être utilisées.
Recommandations
On devrait élaborer des normes quant aux mesures de prévention des infections en milieu de soins ainsi que des mécanismes qui permettent de mettre en oeuvre et d'évaluer ces normes; les ministères provinciaux de la Santé, les associations professionnelles connexes et les organismes de réglementation professionnelles participeraient à cet exercice.
Le ministère de la Santé nationale et du Bienêtre social devrait contribuer à cet exercice et, à cette fin, présenter des recommandations nationales cohérentes et à jour.
On devrait promouvoir l'utilisation de nouvelles techniques et méthodes adéquates qui facilitent l'observance des mesures de prévention particulières, par exemple, l'élimination des aiguilles non recapuchonnées grâce à des dispositifs qui permettent de réduire le risque de piqûres accidentelles.
V. La formation des travailleurs de la santé aux principes et aux mesures de prévention des infections
Énoncé
La prévention des infections fait partie intégrante de la prestation de soins de santé sûrs. L'enseignement des principes de prévention des infections aux travailleurs de la santé est une condition indispensable à la compréhension et à l'application par ces derniers des mesures de prévention des infections.
L'intégration d'une formation structurée en prévention des infections aux programmes de cours des écoles où sont formés les futurs travailleurs de la santé aidera ces derniers à acquérir les connaissances voulues et à mieux comprendre les principes fondamentaux dans ce domaine, dès leur entrée dans la profession. La formation constitue en outre un volet essentiel de l'orientation des employés dans un nouveau milieu de travail, et l'on devrait poursuivre par la suite la formation en cours d'emploi. Si la valeur des programmes structurés de formation ne fait pas de doute, on ne saurait sousestimer l'influence des modèles de comportement sur les pratiques des travailleurs de la santé. C'est pourquoi les employés et le personnel médical de niveau supérieur devraient participer aux programmes de formation. Il convient d'examiner plus à fond la question afin de déterminer s'il est possible de concevoir un programme de base, que l'on pourrait adapter et modifier en fonction des besoins en formation d'un milieu donné.
Recommandations
Les associations professionnelles devraient être chargées de concevoir des programmes de formation continue en prévention des infections et d'en faire la promotion auprès de leurs membres.
La formation en prévention des infections devrait constituer un volet obligatoire du cours préparatoire (avant l'obtention de l'autorisation d'exercer) et de la formation continue.
Les associations, les facultés ou les établissements devraient concevoir des programmes de formation et les évaluer rêgulièrement de façon que l'information soit à jour et suive l'évolution des besoins des travailleurs de la santé. Les programmes de formation continue devraient reposer sur une évaluation des besoins.
VI. Les travailleurs de la santé infectés par le VHB ou le VIH et le risque de transmission en milieu de soins
Énoncé
On estime que le risque d'infection imputable à une exposition à du sang contaminé est 100 plus élevé s'il s'agit de sang contaminé par l'antigène «e» de l'hépatite B (Ag Hbe+) que s'il s'agit de sang contaminé par le VIH. On estime cependant que le risque de décès à la suite d'une exposition unique à un instrument piquant ou tranchant est le même, que cet instrument soit contaminé par le sang d'une personne infectée par l'Ag Hbe+ ou le VIH.
On a abordé un certain nombre de questions qui pourraient avoir une incidence sur les stratégies visant à réduire le risque de transmission du VHB ou du VIH dans un établissemcnt de soins de santé, notamment :
la définition, parmi les personnes infectées par le VHB, d'une souspopulation qui semble pouvoir transmettre plus facilement l'infection (les personnes qui sont Ag Hbe+);
la possibilité de prévenir l'infection par le VHB en ayant recours à la vaccination ou à l'immunoglobuline antihépatitique B;
le fait que l'ostracisme psychosocial est de beaucoup supérieur dans le cas d'une infection par le VIH que dans le cas d'une infection par le VHB;
la volonté des personnes infectées de participer à des stratégies de prévention primaires et secondaires n'est pas la même selon qu'il s'agit d'une infection par le VIH ou par le VHB. Il est probable, par exemple, que les travailleurs de la santé consentiraient plus volontiers à subir un test de dépistage après un exposition importante au VHB, qu'ils ne le feraient après une exposition au VIH. De même, il est possible que les travailleurs de la santé acceptent plus facilement de subir un test préexposition de dépistage du VHB qu'ils ne le feraient s'il s'agissait du VIH;
l'évolution clinique de l'infection à VIH sur le plan de la détérioration mentale et physique pourrait accroître le risque de transmission professionnelle du virus. Si cette affirmation est peutêtre juste en ce qui concerne le VHB, ce n'est pas ce qu'on constate habituellement en pratique clinique.
Recommandation
Il convient de se laisser guider par les mêmes principes lors de l'évaluation du risque de transmission en milieu de soins et de la planification des stratégies visant à réduire ce risque, qu'il s'agisse de personnes infectées par le VHB ou par le VIH. Mais la nature des mesures particulières de prévention peut varier (par exemple, entre les personnes Ag Hbe+ et les personnes Ag Hbe).
VII. Le traitement clinique des travailleurs de la santé avant et apres l'exposition
Énoncé
On a démontré que le vaccin contre l'hépatite B permet de prévenir efficacement l'infection par le VHB. Le fait de protéger les travailleurs de la santé contre l'infection aiguë ou chronique contribuera à diminuer la transmission future de la maladie aux patients par les travailleurs de la santé. L'application des mesures énoncées cidessous pourrait permettre d'accroître l'efficacité des programmes de vaccination contre l'hépatite B :
offrir le vaccin aux employés en poste;
faire de la vaccination une condition préalable à l'embauche;
tenir un registre des personnes qui refusent la vaccination;
exiger que les étudiants inscrits dans une école qui offre de la formation dans le domaine des services de santé soient vaccinés avant de recevoir leur formation clinique.
La surveillance des expositions importantes au sang chez les travailleurs de la santé et chez les patients permettrait de reconnaître les personnes infectées à la suite d'une exposition, de leur offrir du counselling et de traiter rapidement leur infection. À la lumière des données compilées grâce à un tel programme de surveillance, on serait en outre en mesure de mieux cerner les risques d'infection imputables à une exposition donnée.
Un protocole de traitement et de suivi post-exposition des personnes exposées à des pathogènes à diffusion hématogène pourrait s'appliquer de façon générale à tous les pathogènes à diffusion hématogène et être adapté à une gamme d'établissement de santé. Des personnes aisément accessibles seraient chargées du traitement et du suivi des travailleurs de la santé et des patients exposés, conformément aux protocoles actuellement en vigueur.[4]
Recommandations
On devrait vacciner contre le VHB tous les travailleurs de la santé qui sont exposés au sang ou aux produits sanguins ou qui, en raison de leur travail, risquent de se blesser avec des aiguilles ou des instruments tranchants. Les provinces, le gouvernement, les associations professionnelles, les établissements d'enseignement dans le domaine des soins de santé et les établissements de soins de santé devraient élaborer conjointement des programmes de vaccination contre l'hépatite B à l'intention de ces travailleurs de la santé, étant donné que la rentabilité de ces programmes a été démontrée.
Il faudrait concevoir des campagnes visant à promouvoir la santé et les avantages que présente la déclaration des expositions importantes, de façon à accroître la participation dans tous les milieux de soins et à favoriser l'application opportune des protocoles. Les associations professionnelles, les gouvernements provinciaux, les employés et les éducateurs devraient travailler conjointement à la conception de ces campagnes.
Toutes les expositions importantes devraient être signalées par l'entremise d'un mécanisme proactif: (a) qui soit d'accès et d'utilisation faciles; (b) qui protège la confidentialité des renseignements; (c) qui présente de façon claire et succincte les données fournies par les travailleurs de la santé; (d) que les experts interessés pourraient consulter; (e) qui permette la mise en oeuvre d'un protocole de suivi inspirant confiance au travailleur exposé.
VIII. L'évaluation des travailleurs de la santé infectés par le VHB ou par le VIH
Énoncé
On sera en mesure de mieux évaluer les travailleurs de la santé infectés par le VHB ou le VIH si l'on utilise des critères uniformes de façon constante et dans le souci de la confidentialité et si l'on voit, au besoin, à solliciter la participation des organisations, des organismes de réglementation professionnelle et des responsables de la santé publique compétents. La création d'organismes auxiliaires d'évaluation au sein d'organisations de réglementation ou d'organisations professionnelles auxquelles les travailleurs de la santé infectés collaboreront volontiers contribuera à apaiser les inquiétudes de la population.
Lors de l'élaboration des recommandations énoncées cidessous, on a constaté qu'il y avait un plus vaste éventail de points de vue que lors des autres discussions. Ces recommandations serviront de point de départ aux discussions qui se tiendront dans les provinces afin de concevoir une approche uniforme et logique de l'évaluation des travailleurs de la santé séropositifs.
Recommandations
Tout travailleur de la santé atteint d'une maladie infectieuse qui pourrait présenter un danger pour les patients est invité à demander de son propre gré une évaluation médicale quant à la possibilité de transmission de l'infection aux patients. Les travailleurs de la santé infectés par le VHB ou le VIH doivent considérer une telle demande d'évaluation médicale comme une règle éthique fondamentale.
On devrait renforcer et respecter les lignes directrices et les lois actuelles en matière de la confidentialité. La déclaration de la séropositivité d'un travailleur de la santé ne devrait être faite que conformément aux disposition des lois actuelles.
C'est le médecin de première ligne du travailleur de la santé infecté qui devrait être chargé de l'évaluation médicale de ce dernier. On incite les médecins de première ligne qui comptent des travailleurs de la santé infectés parmi leurs patients à demander conseil relativement à l'évaluation du risque de transmission de l'infection en milieu de soins et à avoir recours, pour ce faire, à un mécanisme établi de consultation.
Il faudrait mettre sur pied (de préférence dans chaque province) un mécanisme de consultation auquel les médecins de première ligne pourraient avoir facilement accès. Ce mécanisme devrait protéger la confidentialité et favoriser la participation des responsables de la santé publique, des organismes de réglementation professionnelle ou des associations professionnelles, des spécialistes des maladies infectieuses et de la prévention des infections ainsi que des autres intéressés, selon le cas. Il n'est pas nécessaire que les participants à cet exercice connaissent l'identité du travailleur de la santé en question. On pourrait avoir recours à un réseau provincial existant de déclaration ou de consulation comme mécanisme de consulation.
Voici quels sont les critères en fonction desquels on devrait évaluer les travailleurs de la santé séropositifs : l'évaluation médicale (notamment l'évaluation de la condition psychique); la connaissance et l'application des mesures de prévention des infections; et le risque de blessures causées par des aiguilles et des objets tranchants dans le cadre des fonction du travailleur.
Il faudrait élaborer des programmes d'appui non menaçants, par l'entremise des organismes de réglementation ou des organisations professionnelles, de façon à assister les travailleurs de la santé qui ont dû modifier les pratiques en raison de leur séropositivité. Il serait bon d'offrir des services d'orientation professionnelle et, au besoin, un recyclage professionnel afin de favoriser l'utilisation des aptitudes et des connaissances des travailleurs de la santé.
IX. L'évaluation des interventions effractives effectuées par des travailleurs de la santé infectés par le VHB ou le VIH
Énoncé
Il est arrivé que des pathogènes à diffusion hématogène soient transmis par un travailleur de la santé à un patient au cours d'interventions chirurgiques ou dentaires effractives. Cependant, on n'a pas encore clairement défini quelles sont les interventions chirurgicales particulières (favorisant l'exposition) qui sont associées à la transmission de l'infection, indépendamment de la méthode utilisée, de l'habilité et de l'état de santé du travailleur de la santé. Faute de données sur les risques associés à certaines interventions données, on ne peut s'inspirer du concept des interventions «favorisant l'exposition» pour concevoir des stratégies visant à réduire la transmission des pathogènes à diffusion hématogène en milieu de soins.
Recommandations
Il convient de préciser quels sont les pratiques et les comportements à risque élevé associés aux interventions effractives réalisées dans un milieu de soins donné, de façon à proposer des méthodes plus sûres aux travailleurs de la santé et à surveiller la mise en oeuvre de ces méthodes. Lors du relevé de ces pratiques et de ces comportements, on devrait examiner les points suivants :
les techniques chirurgicales (par exemple, la manipulation d'objets tranchants lorsqu'on n'est pas en mesure de les voir clairement, le fait de palper des objets tranchants avec les doigts);
le milieu (par exemple, la qualité du matériel, le nombre d'assistants, le milieu physique);
la compétence (par exemple, la fatigue, le stress, le niveau de formation, l'expérience et les aptitudes par rapport à une tâche donnée et à la perception des risques);
l'exposition (par exemple, la possibilité de saignement à l'intérieur d'une cavité, un mauvais contrôle du saignement);
le patient (par exemple, un patient non co-opératif, des facteurs physiques défavorables).
X. La divulgation du fait qu'un travailleur de la santé est infecté
Énoncé
La plupart des rapports entre les travailleurs de la santé et les patients ne présentent pas de risque de contact sanguin ou de transmission de pathogènes à diffusion hématogène. Selon les données actuelles, le risque de transmission du VHB ou du VIH par un travailleur de la santé séropositif à un patient au cours d'une intervention effractive serait extrêmement faible.
Soumettre les patients et les travailleurs de la santé à de tests sérologiques comporte de nombreuses dimensions juridiques, éthiques et personnelles et il en est de même de la divulgation des résultats des tests d'une personne infectée. Il convient de trouver un équilibre entre le droit des gens à l'information et les dommages possibles qui risquent d'être causées par la divulgation de certains renseignements. Un travailleur de la santé à l'obligation morale de préserver la confidentialité des dossiers des patients, mais le patient n'a aucune obligation semblable. La perception actuelle de la population concernant les dangers d'une expositon complique encore la décision de divulguer ou non la séropositivé d'un travailleur de la santé. La divulgation de la séropositivité d'un travailleur de la santé risque de compromettre grièvement la capacité de ce dernier d'exercer sa profession, bien que le risque qu'il transmette l'infection à un patient soit extrêmement faible.
Recommandations
La divulgation automatique de la séropositivité d'un travailleur de la santé n'est pas justifiée.
Un patient ayant subi une exposition importante à un travailleur de la santé infecté devrait en être informé. Il n'est pas nécessaire de divulguer l'identité du travailleur en question.
Références
Recommandations visant à prévenir la transmission du VIH en milieu de soins. Can Dis Wkly Rep 1987; 13 (suppl 3) : 110
Guide de prévention des infections pour techniques d'isolement et précautions, rév. (cat. H30-11-6-1F), Ministère de la Santé nationale et du Bien-être social, Ottawa, 1992.
Lynch P, Cummings MJ, Roberts PL et al : Implementing and evaluating a system of generic infection precautions : body substance isolation. Am J Infect Control 1990; 18 : 112
Comité consultatif national de l'immunisation : Guide canadien de l'immunisation, 3e éd. (cat. H49-8/1989F), Ministère de la Santé nationale et du Bien-être social, Ottawa, 1989 : 5556